Futures mères si vous saviez

Publié le 11 Mars 2013

Futures mères si vous saviez

"Sale temps pour les femmes, futures mères si vous saviez"

C'est le titre d'un livre écrit par une gynécologue, Odile Buisson.

En voici le résumé:

" Janvier 2013. Un nouveau scandale sanitaire menace la France : les pilules de 3e et 4e génération seraient responsables de multiples complications, parfois mortelles. Bientôt, les plaintes se multiplient. Pour certains, cette affaire représente l'opportunité de liquider la gynécologie médicale française, ultraperformante mais trop coûteuse à leurs yeux. Notre pays connaît en effet un moment historique de remise en question de la médecine pour les femmes. C'est ce recul sans précédent que dénonce Odile Buisson. Futures mères, si vous saviez ! Derrière la mode de l'accouchement "naturel" (sans péridurale et/ou à domicile), la consécration des pratiques dites "alternatives", le retour du sacré et le rejet de l'hypermédicalisation, l'auteur fustige le vaste mouvement de régression, encouragé par les administrateurs de la santé. Pour ces derniers, cette vague écolo est une véritable aubaine : moins de médecine, c'est moins de dépenses ! Et les mêmes font de la surenchère, par exemple en organisant massivement le retour précoce à domicile des accouchées ou en remplaçant la gynécologie médicale de proximité par une gynécologie "low cost" pratiquée par des intervenants non médecins. Toutes les conditions pour un grand bond en arrière sont réunies. Sale temps pour les femmes."

Je m'interroge sur ce qui fait si peur à Madame Buisson.

Qu'une femme en bonne santé trouve en face d'elle une professionnelle compétente, formée à la gynécologie et à l'obstétrique après 5 années d'études dont une commune aux médecins? Une sage-femme qualifiée pour le suivi gynécologique de prévention et pour le suivi eutocique de la grossesse et de l'accouchement, formée à dépister les pathologies et à orienter vers un gynécologue si nécessaire?

Les sages-femmes sont formées et se battent pour offrir aux femmes et à leurs nouveau-nés des soins de qualité. Elles ont une obligation de formation continue, et approfondissent leurs connaissances notamment par l'obtention de diplômes universitaires. Elles ont également l'obligation d'orienter vers un gynécologue en cas de pathologies (ou de suspicion), et de suivre les femmes en collaboration avec eux dans ce cas.

Je ne vois là rien d'inquiétant.

Ou alors c'est autre chose.

Peut-être a t'elle peur que les femmes trouvent une professionnelle capable de les écouter, de les accompagner dans leur vie de femme, de leur permettre de trouver la contraception qui leur convient, de les aider à accoucher comme elles le souhaitent.

Peut être a t'elle peur que les femmes ne trouvent ce qu'elles recherchent et ne fuient une hypermédicalisation, une infantilisation, un système patriarcal où elles n'ont qu'à subir ce qui leur est imposé.

A lire Madame Buisson, il semblerait que l'accouchement naturel, non médicalisé et sans péridurale ne soit qu'un acte animal, sale et répugnant.

Peut être ne devrions nous aussi concevoir nos enfants que par procréation médicalement assistée, les rapports sexuels n'étant finalement qu'un acte naturel et animal...

Comment réduire la naissance à cela. Prétextant un retour en arrière, une volonté d'imposer aux femmes "d'enfanter dans la douleur", sous couvert de féminisme, on voudrait obliger les femmes à accoucher sous péridurale. Quelle ambivalence, entre ce pseudo féminisme qui voudrait que la femme accouche sans douleur (bah oui c'est quand même mieux pour elle), et ce paternalisme misogyne qui voudrait que le grand médecin décide de tout, sans que la patiente n'ait son mot à dire.

Il fût un temps où les sages-femmes étaient accusées de sorcellerie et condamnées au bûcher, ce temps ne semble pas si loin.

Parce que les sages-femmes ne font pas seulement des actes médicaux, techniques, parce qu'elles accompagnent et rassurent les femmes, parce qu'elles s'emploient à leur redonner confiance en elles, en leur capacité à accoucher, à devenir mère, nous voilà accusées de faire régresser la médecine.

Nous ne rejetons pas la médicalisation quand elle est nécessaire, bien au contraire. Mais nous le faisons en redonnant leur place aux femmes, en leur expliquant les conduites à tenir, en les faisant participer aux choix thérapeutiques qui les concernent. Ce qui finalement revient simplement à respecter la loi, qui veut que les patients soient informés afin de donner leur consentement libre et éclairé.

L'expérimentation des maisons de naissance est sans cesse repoussée, sous prétexte de préserver la santé des femmes. C'est assez "amusant" quand on sait que dans les pays voisins les femmes accouchent sans problème en maison de naissance, que leur taux de morbidité périnatale sont meilleurs que les nôtres. Que les femmes sont encouragées et soutenues pour l'allaitement.

Sous prétexte qu'il y a 30 ans, la péridurale fut effectivement une grande avancée pour les femmes, que la médicalisation a permis de sauver de nombreuses vies de femmes et d'enfants, il faudrait maintenant accepter une hypermédicalisation, et une toute puissance du corps médical.

Il faudrait stéréotyper l'accouchement, sans laisser de place à l'éventuel souhait des patientes à accoucher différemment.

Quelle avancée pour les femmes, quel respect, de leurs choix, de leurs corps!

La différence, dans quelque domaine que ce soit, est toujours mal perçue, et jugée.

Je suis lasse que ma profession fasse sans cesse l'objet de propos méprisants de la part de certains médecins.

Est-ce parce que c'est une profession essentiellement féminine que les sages-femmes sont si mal défendues, si malmenées, si mal payées, si peu reconnues?

J'ai choisi d'être sage-femme parce que je voulais m'occuper des femmes, les soigner, les soutenir, les défendre. Un brin féministe sans doute.

Je ne pensais pas avoir d'abord à me battre pour défendre ma profession.